L'ILLUSTRATIONPrix du Numéro: 75 centimes.
SAMEDI 17 JANVIER 189149º Année.--Nº 2499
CÉLINE MONTALAND
Phot. Van Bozch, Boyer succr.
MM. les actionnaires de la Société du journal l'Illustration sontprévenus que l'Assemblée générale ordinaire aura lieu au siège social,13, rue Saint-Georges, à Paris, le samedi 31 janvier 1891, à deuxheures.
Examen, et approbation, s'il y a lieu, du bilan et des comptes del'exercice 1890.--Répartition des bénéfices.--Fixation dudividende.--Renouvellement du conseil de surveillance.--Fixation duchiffre du traitement du gérant pour l'année 1891.--Fixation du prixauquel le gérant pourra procéder au rachat d'actions de la Société en1891.--Tirage au sort des obligations à rembourser en 1891.
Pour assister à cette Réunion, Messieurs les Actionnaires propriétairesde titres au porteur doivent en faire le dépôt avant le 25 courant, à laCaisse de la Société. Il leur sera remis en échange un récépissé servantde carte d'entrée.
Le froid qu'il fait, les morts qui se succèdent les unes aux autres, laquestion du chauffage, le sort des pauvres gens, et, avec cela, lespièces nouvelles ou attendues, voilà, par ce rude hiver, les sujets deconversation des Parisiens qui n'ont pas encore pris le train de Nice.
Car maintenant, lorsqu'arrivent les mois de froidure, pour parler commenos pères, c'est pour tous ceux qu'une fonction, une occupation, unemédiocrité de fortune ou une habitude n'attache pas à une rue de Paris,une fugue véritable vers les bords bénis où la mer bleue gémit, cettemer bleue où l'ex-maire de Toulon jetait le trop-plein de ses aventures.
On part et les hôteliers parisiens, ces thermomètres spéciaux, nousdiront que le nombre des voyageurs diminue de plusieurs degrés icitandis que le chiffre grossit vers Cannes, Bordighera ou Saint-Raphaël.Et comment ne partirait-on pas? Il est convenu que le Midi est le jardind'hiver de tout bon Parisien dans le train. Pour rester dans cetrain, on prend celui de P.-L.-M. Il paraît qu'on soigne sesbronchites et qu'on réchauffe ses rhumatismes à la brise de laMéditerranée. Ce n'est pas toujours vrai. On s'y dorlote, mais on ygrelotte. Qu'importe! On est dans le Midi. C'est le soleil du Midi,c'est la côte du Midi. Il n'y a que la foi qui sauve.
A vrai dire, les cavalcades et les carnavals ont, là-bas, un décor quiles fait valoir, et je ne sais rien de plus triste, à Paris, que lesmascarades par ces froides nuits si longues. Quand je pense qu'il setrouve encore des gens pour se planter dans le vent, sur les trottoirsdes environs de l'Opéra, et attendre l'entrée des masques! Il fallaitles voir, samedi dernier, ces masques au nez rougi et aux mains gourdes,se rendant au bal de l'Opéra, par les rues désertes, balayées de labrise! Les pâles pierrots verdissaient sous leur farine; les clowns,avec leurs paletots jetés sur leur costume à paillettes, soufflaient surleurs ongles endoloris, et les toreros (car il y a beaucoup de torerosparmi ces travestissements) toussaient mélancoliquement et battaient lasemelle sur les trottoirs. O ciel d'Andalousie, nuits étoilées deSéville et de Grenade, où êtes-vous?
Il est banal de venir déclarer que cette gaieté est macabre, mais ellel'est. Ces fillettes qui ont l'onglée, ces bergères Watteau qui évoquentl'idée d'un prompt sirop pectoral, ce défilé de masques bizarres sous lalueur crue de la lumière électrique, c'est le carnaval parisien, c'estune gaieté convenue, je veux bien, ma